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...de beffrois


Symbole des libertés acquises par les communes, isolés ou incorporés aux hôtels de ville, ils ont rythmé la vie des cités dès le 11ème siècle ; on les associe souvent au Nord ou au Pas-de-Calais, et pourtant on trouve aussi plusieurs beffrois dans le département de la Somme...

le beffroi d'Abbeville

Si on rencontre des beffrois un peu partout en Europe, leur construction a été, au début, limitée géographiquement et concentrée dans la région qu'on appelait les Pays-Bas et qu'on pourrait borner au sud par la Somme, au nord-est par la Meuse et la Moselle et au nord par les bouches du Rhin.

Depuis juillet 2005, 23 beffrois de l'actuelle région Nord-Pas de Calais-Picardie sont inscrits au patrimoine mondial de l'Unesco.

Les premiers beffrois sont apparus au 11ème siècle. La période connaissait alors une certaine prospérité et l'essor économique favorisa les marchands qui s'enrichissèrent, s'organisèrent et devinrent des bourgeois. Ceux-ci ne tardèrent pas à revendiquer une autonomie et des privilèges auprès du suzerain. Autonomie et privilèges qui leur furent accordés par le biais d'une charte et d'une franchise communale.

Pour marquer ces nouveaux pouvoirs, les bourgeois firent édifier des tours qui vinrent rivaliser avec le donjon du seigneur et les clochers des églises : les beffrois.

Lieu multifonctionnel, le beffroi concentrait tous les privilèges nouvellement acquis et abritaient :

- une salle d'échevinage (où était également rendue la justice ;

- des cachots ;

- une salle d'armes pour les soldats chargés de faire le guet au sommet de la tour ou dans les rues ;

- une salle du trésor qui contenait les chartes, le sceau de la ville, le trésor (en numéraire et objets précieux) ;

- une salle contenant les cloches qui rythmaient la vie de la cité en annonçant le lever du soleil, le couvre-feu, les heures de travail et de repos ou encore la convocation aux assemblées ;

- un poste de guet d'où le guetteur pouvait surveiller la ville et les alentours.

A partir du 14ème siècle, les beffrois devinrent insuffisants et on leur greffa de nouveaux bâtiments, généralement accompagnés de halles : l'hôtel de ville.

Outre ceux des hôtels de ville reconstruits après 14/18 (Albert, Montdidier, Moreuil ou Roye), la Somme compte six beffrois parmi ceux classés à l'Unesco :

- ABBEVILLE :

Bâti en grés, c'est une austère tour carrée de 33 mètres de haut ressemblant à un donjon. Le clocher d'ardoises est surmonté d'une girouette qui représente Guillaume Talvas, comte de Ponthieu ; il a été rétabli en 1986 (l'ancienne toiture et son dôme qui avaient été installés au 18ès avaient brûlé en 1940).

L'intérieur comporte : des cachots au rez-de-chaussée, aux premier et deuxième étages les collections du musée Boucher de Perthes ; au troisième étage la salle haute, qui servait à l'origine de prison ou de salle de repos pour les hommes d'armes et garde des graffitis des 15 et 16ès ; et enfin dans la toiture les cloches et une loge pour le guetteur.

Les bourgeois d'Abbeville obtinrent leur charte au 12ème siècle (confirmée en 1184 par le comte Jean Ier de Ponthieu) et édifièrent leur beffroi en 1209 (il s'agit là de l'un des plus anciens de France). En 1468 fut construit la bâtiment dit "de la trésorerie", d'un beau style gothique.

Au 18ème siècle, le beffroi était environné de plusieurs batîments qui abritèrent l'hôtel de ville jusqu'en 1940. Tout fut anéanti durant la seconde guerre mondiale ; dans les années 1950, deux bâtiments modernes furent construits à l'arrière du beffroi pour abriter le musée Boucher de Perthes.

- AMIENS :

La ville obtint sa charte en 1113 par le comte d'Amiens (confirmée en 1190). Un premier beffroi fut construit en 1244. Incendié en 1406, il fut immédiatement reconstruit : la massive tour carrée en pierre date de cette époque. Le beffroi eut à nouveau à souffrir d'incendie en 1562 et en 1762. L'architecte Beffara dressa alors les plans d'un nouveau clocher "en dur" pour remplacer l'imposant ouvrage en charpente qui le coiffait jusqu'alors : un clocher en pierre percé de baies en plein cintre, accosté de volutes et surmonté d'un beau dôme à lanternon. Complètement sinistré en 1940, il fut sommairement réparé et coiffé d'une inesthétique toiture en tôle provisoire qui ne sera remplacée qu'en 1989-1990 lors de la restauration générale de l'édifice à l'identique : les horloges qui étaient restées calcinées ont retrouvé leurs aiguilles, le clocher son beau dôme en ardoises et l'intérieur nettoyé et consolidé.

A l'intérieur, au rez-de-chaussée, sont conservés des fragments de la cloche Marie-Firmine, fondue en 1748 et pour laquelle il avait fallu percer le mur pour pouvoir l'installer. Elle s'est effondrée en 1940 ; depuis 2001, un carillon a été placé dans le dôme rythmant ainsi délicieusement les heures.

Au premier étage on trouve l'ancienne salle des échevins, au deuxième des cachots (le beffroi servit de prison jusqu'en 1932 !) et au troisième se trouvent les archives et le magasin d'armes.

- DOULLENS (cf aussi "Une Somme de promenades, Doullens") :

Une charte est accordée aux habitants de Doullens en 1202 par Guillaume II de Ponthieu (confirmée par Philippe-Auguste en 1221). Une tour (qui avait été construite en 1286) fut d'abord acquise par la commune pour en faire son beffroi. Elle fut plusieurs fois incendiée et à chaque fois reconstruite. La dernière reconstruction remonte à 1613, c'est le beffroi actuel.

Le beffroi est établi au sommet de l'ancienne maison communale qui conserve un rez-de-chaussée en pierre du 15ème siècle avec un beau porche et un étage en brique et pierre. La tour est une belle construction en briques à chaînages de pierre à bossages surmontée d'une haute guérite de forme allongée couverte d'ardoises (aménagée au 18ème siècle). La guérite abrite une cloche, "Jeanne" fondue en 1541.

- LUCHEUX (cf aussi "Une Somme de promenades, Lucheux") :

Située à un emplacement stratégique, la petite cité de Lucheux fut entourée d'une enceinte dès le 13ème siècle. Le beffroi fut construit sur l'une des portes de la ville en 1320 (la commune obtint sa charte en 1202).

La charte de la commune, les sceaux, les monnaies y étaient entreposés.

Le beffroi est une grosse tour en craie, haute de 22 mètres, assise sur un passage voûté d'ogives sur la voie principale qui traverse la commune. Il fut plusieurs fois remanié, notamment au début du 20ème siècle dans ses dispositions intérieures (le plafond du premier étage fut alors rehaussé et le deuxième étage supprimé) et une tourelle engagée abritant un escalier fut construite sur son flanc.

Jeanne d'Arc y fut enfermée une nuit avant d'être emmenée vers Rouen en 1430.

En 1464, c'est au beffroi de Lucheux que Louis XI signa le 19 juin, l'édit de Luxiès (ancien nom de Lucheux) qui prévoyait la création de relais de poste pour porter les courriers du roi (le premier réseau de poste ne fut pourtant effectif qu'en 1479).

- RUE :

La ville reçut sa charte en 1220 et un premier beffroi fut construit peu après. Abattu pendant la guerre de 100 ans, il fut remplacé par le beffroi actuel en 1446-1448. C'est une tour en craie, haute de 29 mètres, flanquée de contreforts et surmontée de 4 échauguettes.

Des modifications furent opérées dans la deuxième moitié du 19ème siècle : en 1860, le beffroi reçut alors sa toiture pyramidale et son clocheton et des bâtiments bas furent construits de part et d'autre dans le style néogothique ; bâtiments qui abritèrent les réunions municipales jusqu'en 1969 date à laquelle l'ensemble perdit sa fonction d'hôtel de ville.

- SAINT-RIQUIER :

La ville de Saint-Riquier, qui fut capitale du Ponthieu aux 10 et 11ème siècles avant d'être supplantée par Abbeville, compta jusqu'à plus de 10000 habitants. Elle reçut sa charte communale en 1126 (une des premières de France).

Le beffroi était construit à l'origine contre l'échevinage. Endommagé, il fut reconstruit en 1283 puis remanié et agrandi en 1528 lui conférant son aspect actuel. L'intérieur fut complètement réaménagé en 1788.

Le beffroi est un tour carrée de 18 mètres de haut en pierre sur une base de grés, flanquée de tourelles. A l'intérieur, les salles ont perdu leurs voûtes lors des travaux du 18ème siècle ; au rez-de-chaussée, l'ancienne prison accueille aujourd'hui l'office du tourisme. Notons qu'une pièce du beffroi a servi à la célébration des mariages et aux réunions du conseil municipal jusqu'en 2004 !

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